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mercredi 15 mai 2013

Critique : Crimes et châtiments, la revue


Genre : magazine trimestriel
Intitulé : Quand le fait divers devient fait majeur
Éditeur : Éditions Jacob-Duvernet

Il ne s’agit pas ici du roman de Dostoïevski, mais du magazine lancé début 2012.

Cette revue fort bien écrite traite de tout ce qui gravite autour du crime, celui qui nous révolte et nous fascine simultanément : la police, la justice, le milieu, le fait divers au sens large. Il se compose d’articles divers, comme les faits qu’il relate : analyses, récits, témoignages de professionnels et de spécialistes.

Il raconte le présent, mais aussi le passé. Ainsi ce dossier passionnant quoiqu’assez effroyable sur les bourreaux dans le numéro 2, qui retrace leur histoire depuis le Moyen-âge et offre une plongée crue dans les fanges de l’âme humaine, rappelant que la morale dépend du milieu dans lequel on vit.

Les auteurs sont des écrivains, des journalistes et des spécialistes des corporations concernées.

Crimes et châtiments devrait trouver son public : nombreux sont les amateurs de polar. Il constitue aussi une mine d’informations pour les romanciers de genre policier / roman noir / thriller.

Bien présenté (même s’il manque les aléas au début des paragraphes) et correctement illustré, ce périodique propose un contenu conséquent : presque 200 pages. Autant qu’un livre. Son prix aussi d’ailleurs : 15 EUR 90. Comme un livre, il pourra trôner sur l’étagère de la bibliothèque, car la plupart de ses articles ne se démodent pas, un peu comme un magazine d’histoire ou de philosophie.

Il se veut littéraire et se prétend « revue haut de gamme », peut-être par opposition au Nouveau Détective. Distinction accordée.

 
 

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mardi 2 avril 2013

Critique : L’indic et le commissaire


Auteur : Lucien Aimé-Blanc (commissaire) assisté de Jean-Michel Caradec’h (écrivain et journaliste)
Éditeur : Plon
Date de parution : 2006 (manuscrit achevé le 14 septembre 2005)
Genre : Mémoires mémorables d’un flic 

Lucien Aimé-Blanc est un brillant policier français dont la carrière s’étend sur 30 ans à partir de 1961. Connu surtout pour sa participation à la traque de Mesrine (ses révélations sur le sujet publiées en 2002 ont fait du bruit), il a œuvré en tant que commissaire dans différents services de lutte contre le grand banditisme : la Brigade Mondaine, l’OCRB, la BRI, les Stups…

Dans ce livre, il décrit les affaires marquantes sur lesquelles il a travaillé de 1961 à 1983. Ses révélations sont à la fois fracassantes et effarantes. Pour résumer, l’État français via les services secrets a régulièrement recours à des tueurs de la pègre pour perpétrer des assassinats politiques. Des exemples ? Enlèvement d’un opposant marocain (affaire Ben Barka) ; assassinat d’un gauchiste turbulent (affaire Pierre Goldman, le frère de Jean-Jacques) ; assassinat d’un militant tiers-mondiste (Pierre Curiel) ; assassinat de leaders corses indépendantistes (Guy Orsoni). À noter que l’État espagnol n’est pas en reste, avec les commandos GAL chargés d’éliminer en toute impunité des dizaines de membres de l’ETA.

À propos de l’affaire Ben Barka, l’auteur divulgue des écoutes téléphoniques, prouvant que le Premier Ministre de l’époque (Pompidou) était au courant du projet d’enlèvement…

Pour recruter les tueurs de la pègre, l’État dispose de plusieurs moyens : paiement cash par contrat, protection des activités illégales du tueur (prostitution, jeu), réduction de peine. En Espagne, on a même parfois fait sortir des criminels de prison pour les enrôler dans les commandos GAL.

On comprend mieux, à la lecture de ces révélations, pourquoi l’opinion publique adhère souvent à la théorie du complot : c’est parce que les crimes d’État parsèment l’histoire de notre beau pays démocratique et parce que des complots, il y en effectivement parfois, et des bien répugnants.

L’autre aspect intéressant du livre, c’est la description des rapports nécessaires et troubles entre la police et les indicateurs. Sans indic, pas de police, c’est bien connu. La difficulté pour les policiers consiste à ne pas franchir la ligne jaune, les relations avec les indics étant illégales. Pour bien faire son métier, le policier est obligé d’enfreindre la loi.

Laissons la conclusion à Aimé-Blanc :

Dans la police, il faut choisir : ou bien prendre des risques pour lutter contre les criminels, ou soigner sa carrière en évitant la moindre vague. En fin de parcours, on retrouve beaucoup plus de directeurs qui n’ont jamais arrêté personne que d’hommes de terrain. Ce n’est pas une caractéristique propre à la police.

En effet, il s’agit là d’une caractéristique typiquement bureaucratique et étatique : en général mieux vaut ne rien faire d’audacieux, d’innovant ou de créatif ; juste se concentrer sur le pain quotidien : dépenser l’argent du contribuable, sans oublier de pleurnicher sur le manque de moyens…
 



 

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mercredi 9 janvier 2013

Critique : Les rois du crime, d’Alexandre Bonny


Sous-Titre : Le grand banditisme français
Éditeur : Éditions First
Date de parution : 2009
Genre : Essai journalistique 

Alexandre Bonny nous raconte d’une façon vivante et romancée la vie et la mort d’une brochette de grands criminels français : Émile Buisson, les frères Guérini, Pierrot le fou, René la canne, François Marcantoni, Albert Spaggiari, Tany Zampa, Jacques Mesrine, Francis Vanverberghe, le gang des Lyonnais, le gang des postiches, Michel Crutel, Pascal Payet, le clan Hornec, Antonio Ferrara.

Ce qui est passionnant, c’est qu’il est possible de dégager un certain nombre de points communs à ces grands criminels. Même si bien sûr il y a de nombreuses exceptions, on peut tracer une sorte de portrait-robot comportemental et sociétal du criminel doué.

Le criminel nait souvent dans un milieu social très défavorisé. Très tôt, il se lance dans des menus larcins, connait la prison pour de courtes peines. Loin d’être rédemptrice, la prison lui permet de se faire des contacts au sein de la pègre, et l’encourage en fait sur la voie du crime.

Le métier de base du grand criminel est le braquage. C’est souvent dans cette activité qu’il se fait un nom et bâtit sa fortune. Attaque à main armée de banque, poste, usine, fourgon, bijouterie, enlèvement, cambriolage, saucissonnage. Activité lucrative mais risquée. Elle a l’inconvénient d’attirer l’attention de la police. D’où cavale, parfois sans quitter la région, car avec du cash, on se planque facilement.

Ensuite, le grand criminel a deux voies possibles.

S’il est gestionnaire, comme la mafia italienne, arménienne ou américaine, il investit son capital et fait tourner son business comme un chef d’entreprise. Il a alors pignon sur rue, travaille avec des avocats et jouit du soutien de politiciens corrompus comme Jacques Médecin à Nice et Gaston Deferre à Marseille. Il prend des participations dans des discothèques, bars, machines à sous, casinos, prostitution, etc. Il lui arrive de toucher aux trafics en tous genres : armes, drogue, êtres humains. Il tombe en général quand le politicien le lâche sous la pression de l’opinion publique, après de longues années d’impunité. Ou bien il se fait prendre pour une broutille, genre fraude fiscale (comme Al Capone).

Deuxième voie : s’il est accro à l’adrénaline, il ne cesse d’enchainer braquages et cavales pendant lesquelles il claque son fric. Il sait qu’il devrait décrocher, mais il n’y arrive pas, grisé par sa puissance, la gloire. Toujours il revient en France et remet ça. Même s’il est richissime. L’argent n’est pas la seule motivation. Il tombe rarement en flagrant délit. Il sait bien qu’il va se faire prendre, mais impossible de décrocher. Un jour, il se fait dénoncer par des comparses. C’est la pègre qui fait tomber la pègre. Mais un truand isolé ne pourrait pas refourguer sa marchandise, et il faut souvent s’associer à plusieurs pour monter un coup. Ou bien il se fait tuer lors d’un règlement de compte entre bandes pour le contrôle d’un territoire.

Le grand criminel ridiculise la police, parfois pendant de longues années comme le gang des postiches et celui des Lyonnais. Malgré des moyens gigantesques, la police n’arrive à rien ou presque à cause de la corruption, des lois et de la ruse des malfrats. À noter que la corruption touche toutes les couches de l’État : police, administration pénitentiaire, justice, et bien sûr, les parrains étatiques que sont certains députés-maires.

Et la justice ? Encore plus grotesque que la police. C’est simple : la condamnation d’un malfrat est parfaitement aléatoire. Certains sont accusés pour des crimes qu’ils n’ont pas commis, d’autres sont blanchis pour ceux qu’ils ont perpétrés. En fonction de l’incompétence du juge, le petit malfrat peut prendre perpétuité, le grand criminel bénéficier d’un non-lieu. La justice française, c’est la loterie du diable.

 

 

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