vendredi 30 septembre 2011

Les fables de Lordius - Épisode 1 : Chère guerre

Cette fable est une fiction. Les nombreuses ressemblances avec des humains et pays réels sont des coïncidences troublantes.
 
            Léon presse le pas. Il est attendu par le président des Territoires-Unis en personne, le chef du plus puissant peuple singe du monde. Dans l’ascenseur, il se contemple dans la glace. Il voit un chimpanzé âgé, le poil gris mais les épaules larges et le ventre plutôt plat pour un représentant du peuple singe le plus vorace de la Terre. D’un geste précis, il rajuste sa cravate, accessoire obligatoire de l’uniforme des singes politiques, comprenant la chemise blanche et le costume gris foncé.
            La glace lui renvoie son sourire satisfait, presque condescendant. Il vient tout juste d’être nommé secrétaire de la Guerre, l’apogée de sa longue carrière politique. Le président l’a récompensé pour l’assassinat du chef de la tribu des macaques qui avait perpétré un attentat sanglant et spectaculaire sur le sol des Territoires-Unis il y a dix ans.
            Le cœur de Léon accélère en pénétrant dans le mythique bureau ovale du président Arnack Aubasmot. Celui-ci se lève pour l’accueillir avec un geste de bienvenue. Léon ne peut s’empêcher d’admirer la stature splendide du président, magnifiée par l’aura de sa prestance issue de l’habitude de commander aux singes. Le mâle dominant du premier peuple singe de la planète est grand, mince, le poil encore luisant, dans la force de son âge politique. Seule la couleur de la cravate différencie leurs uniformes politiciens. Le beau visage du président est tendu. Il est parcouru de grimaces simiesques trahissant une tension nerveuse.
            — Asseyons-nous sur le divan, Léon. Je vais aller droit au but, mon agenda est plein comme un œuf de femelle gallinacé. Vous n’imaginez pas toutes les singeries que ma fonction implique ! Bref, j’ai besoin de réduire les dépenses militaires pour financer un plan de relance.
            — Nos troupes finissent de se retirer du Territoire du Désert, monsieur le Président.
            Les grimaces du président redoublent d’intensité. Il soupire et se gratte machinalement le torse à travers l’uniforme.
            Damn ! Ce conflit est le pire fiasco qu’ait connu notre empire depuis la guerre du Territoire des Rizières Coriaces. Je me suis empressé de liquider le pot de pus hérité de mon prédécesseur. Quel primate celui-là ! Il a osé déclarer que c’est Dieu qui lui avait ordonné d’attaquer le Territoire du Désert… Dommage qu’Il ne lui ait révélé dans la foulée que les armes de destruction massive étaient le fruit de l’imagination paranoïaque de nos barbouzes incompétentes !
            — Nous sommes un peuple chimpanzé agressif, monsieur le Président. C’est notre instinct presque animal qui nous pousse à guerroyer. À condition que ce soit hors de notre territoire, bien sûr.
            — Mais le coût, Léon, le coût ! Tant pis pour le prestige. Mais la facture est colossale. Des milliers de milliards de dollars bananiers partis en fumée !
            Le dollar bananier est l’unité monétaire des Territoires-Unis. Il correspond au prix d’une banane, en monnaie de singe. D’autres régions du monde utilisent une monnaie équivalente, comme l’euro bananier qui a cours sur le Continent Sénior. Les pays qui ont adopté l’euro bananier sont regroupés au sein de la Désunion des Républiques Bananées. À ne pas confondre avec les Républiques Bananières, plus au sud.

 

mercredi 28 septembre 2011

Critique littéraire : Cugel l’astucieux de Jack Vance

Jack Vance est un écrivain américain né en 1915, connu pour ses romans de science-fiction.

Cugel l’astucieux, paru en 1965, est un roman au carrefour entre la fantasy et la science-fiction. Mais en vérité, ce classement n’est qu’une trame de fond, un décor, car le vrai genre de ce roman est la comédie burlesque.

Cugel est un aventurier voleur, menteur, lâche, astucieux (forcément) et surtout sans scrupule. Tous ces traits de caractère sont des qualités qui permettent au héros de se tirer des pires situations. Ni lui ni aucun personnage n’ont la moindre moralité : dans le monde cruel où se débat Cugel, il s’agit de survivre, souvent en sacrifiant l’innocent.

Dans la plupart des aventures que vit, ou plutôt subit, Cugel, sous des dehors policés les protagonistes n’ont qu’une idée en tête : rouler l’autre. Et Cugel ne gagne pas toujours à ce petit jeu, ce qui ménage le suspense.

Je me souviens d’une interview qu’avait donné Jack Vance il y a bien longtemps. On a lui avait demandé son œuvre préférée parmi les dizaines de romans et les centaines de nouvelles qu’il a écrit. C’est la série des Cugel qui m’a donné le plus de plaisir à écrire, répondit-il, parce que c’était amusant.

En effet. Cocasse, burlesque, d’un humour cynique soulignant la dérision de la condition humaine, Cugel l’astucieux est le roman le plus drôle que j’ai jamais lu.



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lundi 26 septembre 2011

Nouvelle courte : La légende est en marche - Suite et fin

            1ère partie

— Sauver… reprend le disciple. Si vous me permettez un mot joueur dans notre situation tragique, Maître, pourquoi ne vous sauvez-vous pas de cette ville ? J’ai voyagé dans les pays voisins avant de vous suivre. De nombreuses communautés religieuses sont prêtes à croire en un Dieu unique qui offre la vie éternelle pourvu qu’on ait la foi. Ces idées sont inspirées de courants philosophiques grecs.  Il ne manque que le trait d’union entre Lui et les hommes, son Fils mythique ou réel. Le terreau est fertile, la graine a été semée. Il ne reste qu’à arroser…
            — Arroser avec mon sang… Il est trop tard pour fuir. J’ai demandé à l’un de vous de me dénoncer…
            — Je comprends à présent pourquoi vous avez dit lors du souper : « Ce que tu as à faire, fais-le vite. » Mais pourquoi ?
            — Pour que se réalise la prophétie des écritures. Et pour en finir… Je…
            Le Maître met sa tête dans ses mains, en plein désarroi. Le disciple s’approche, pour entendre ce que le Maître murmure :
            — Mon Père, éloigne de moi ce calice amer, s’il se peut…
            — Maître, au crépuscule de notre rencontre, confiez-vous le tourment qui vous oppresse…
            Le Maître retire les mains de son visage sombre. Ses yeux sont humides, sa respiration forte.
            — Mon âme est troublée. Mon cœur est triste à mourir. Je doute. Les autorités veulent me faire mettre à mort pour blasphème. Elles ne croient pas que je sois le fils de Dieu. Les pharisiens pensent que je suis fou, que j’ai un démon. Or j’entends la voix de mon Père dans ma tête parfois… Mais est-ce bien Lui ? Et si les Pharisiens avaient raison… Il faut en finir, je dois savoir…
            — Maître, j’ai discuté avec les autres disciples. Si vous êtes condamné, nous pouvons soudoyer les gardes et vous remplacer par un esclave drogué avant l’exécution.
            — Quoi ! Un innocent exécuté à ma place ? Quelle indignité !
            — Qu’il soit fait selon votre volonté. Nous avons élaboré une autre solution. Nous enlèverons votre corps du tombeau et proclamerons à travers Jérusalem que vous êtes revenu d’entre les morts. La légende est en marche, Maître !
            — Quoi ! Mais…
            On frappe avec force à la porte.
            — Au nom du Préfet Ponce Pilate, ouvrez !


Fin

Je dédicace cette nouvelle à jchr.be

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vendredi 23 septembre 2011

Nouvelle courte : La légende est en marche

            Le Maître est assis sur une chaise, les épaules voûtées, les traits défaits. Jamais son disciple ne l’a vu aussi accablé. D’autres disciples font mine d’entrer dans la pièce. D’un geste, il leur fait signe de rester à l’écart.

            — Nous sommes pourchassés comme des bandits ! s’insurge le disciple.  Il y a peu, des foules nous suivaient. À présent, nous en sommes réduits à mener une vie clandestine ! Les ingrats ! Comment peuvent-ils vous pourchasser après tout le bien que vous avez fait ? Tous ces malades que vous avez guéris, les aveugles, les possédés, les épileptiques, les lépreux, les…

            — Je n’ai jamais guéri de lépreux ! La rumeur enfle les faits…

            — La légende est en marche, Maître !

            — J’ai déjà dit que je voulais persuader les foules par la parole, et non grâce à mes talents de guérisseur.

            — Les foules sont parties. Elles attendaient un roi capable de prendre la tête d’une insurrection contre l’envahisseur.

            Le Maître secoue la tête, comme s’il s’entretenait avec un cancre fini. Il soupire et reprend :

            — Loin de moi le pouvoir temporel corrupteur ! Je fais le bien et non le mal, je suis la Loi et ne prêche pas la révolte contre l’envahisseur.

            — Vous prêchez contre les autorités religieuses. Elles veulent votre mort.

            Le visage du Maître se crispe et s’empourpre. Il serre les poings et se lève.

            — Les hypocrites ! Les hommes de peu de foi ! Avec formalisme ils pratiquent, mais leur cœur n’y est pas. Ils ne comprennent pas qu’il faut dépoussiérer la morale archaïque.

            — Mais Maître, les écritures sont sacrées…

            — Voudrais-tu lapider un homme qui ramasse du bois pendant le sabbat, qui insulte ses parents ou pratique l’adultère ? Allons ! Nous ne sommes plus au temps de Moïse ! J’ai prêché une morale plus douce, empreinte de plus de sollicitude et de fraternité.

            —Vous leur avez maintes fois fermé la bouche ! Mais votre morale est difficile à appliquer.

            — C’est un idéal vers lequel tendre. La perfection n’est pas donnée aux hommes.

            Les deux hommes gardent le silence. Puis le disciple dit :

— Nous sommes recherchés pour trouble à l’ordre public depuis la bagarre générale avec les vendeurs du Parvis.

            Le Maître pâlit, se rassoit. Il cligne des yeux nerveusement.

            — Je me suis emporté ce jour-là… Un démon m’a poussé. Mes nerfs éprouvés ont lâché. J’ai agi contre le bien : j’ai été violent, moi qui suis là pour apaiser ; j’ai jugé, moi qui suis sur Terre pour sauver…


Fin de la première partie

2ème et dernière partie

mercredi 21 septembre 2011

Les ateliers d'écriture

C’est quoi ?

Un groupe de personnes se réunit autour d’une table pour écrire à thème sous la houlette d’un animateur. Les participants sont en général de 3 à 10, la séance dure entre 1h30 et 3h.


Ça se déroule comment ?

            Dans la forme « ludique », pour les débutants et les jeunes, l’animateur propose une série d’exercices qui permettent d’écrire des textes très courts, en prose ou vers au choix du participant. À la fin de chaque exercice, chacun lit sa production et les autres commentent avec bienveillance

Dans la forme « sérieuse »,  il n’a qu’une passe (ou deux maximum) : on n’écrit qu’un seul texte, plus long. Exemple de déroulement : l’animateur lit un texte littéraire pendant quelques minutes. De ce texte dégage une ambiance, des thèmes. L’animateur demande de respecter si possible quelques contraintes, quelques directions à suivre. Par exemple, ce peut être trois consignes comme jouer sur les mots, voguer entre rêve et réalité et tenter d’adopter un style poétique. La rédaction dure autour de 1 heure, ce qui permet d’écrire entre 500 et 1000 mots. Puis chacun lit son texte, que les autres commentent ensuite.



Ça sert à quoi ?

            À plein de choses ! Pour les débutants qui ont du mal écrire, l’atelier permet l’inspiration, par l’utilisation de thèmes et de « contraintes ». L’émulation du groupe est vive. La contrainte de temps permet de se forcer à être productif. Les conseils donnés sont parfois précieux pour progresser. Les textes écrits peuvent servir de base pour ensuite être tranformés en nouvelles voire en romans. On peut trouver dans le groupe des relecteurs pour son manuscrit, les bons relecteurs étant une denrée rarissime. On noue des relations avec ses « pairs ». On rompt la solitude de l’écrivain. Et tout plein d’autres apports encore !

Où en trouver ?

            C’est là que le bât peut blesser… Surtout le bas de laine… Les ateliers d’écriture payants sont faciles à trouver sur le net, mais ils sont très chers et pas forcément mieux que les petites structures bénévoles. Ils attirent à mon avis certains élèves dont le raisonnement discutable peut être : « Si c’est cher, c’est que ça le vaut bien : je vais progresser plus vite »

            Dénicher un atelier d’écriture gratuit ou bon marché n’est pas chose aisée car les petites structures ont peu de visibilité sur internet. Voici quelques suggestions issues de mon expérience :

  • Démarcher la mairie de son domicile et la bibliothèque de quartier.
  • Chercher sur google. Atelier d’écriture + nom ville. Ce type de recherche trouve rarement les petites structures bénévoles. Je conseille plutôt les mots dérivés du concept associatif: « café littéraire associatif + nom ville », « maison des associations » « maison de la culture » « annuaire des associations », etc... Vous l’aurez compris, la recherche demande de faire preuve de créativité dans le choix des mots. Excellent échauffement pour l’atelier !
  • OVS, site de sorties communautaire propose régulièrement des ateliers d’écriture gratuits.

Sur Paris, je conseille Le Petit Ney.


 
Les ateliers d’écriture sont encore rares en France, contrairement aux États-Unis par exemple. D’une part le concept est peu connu dans notre beau pays un peu archaïque sur certains points, d’autre part les volontaires ne se bousculent pas car même si l’activité est très épanouissante, elle demande un réel effort de participation active. L’opposé de la télé !

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lundi 19 septembre 2011

Nouvelle courte : Le précurseur révolté – suite et fin

Première partie

Ils me sous-estiment. Ils ne croiront pas mon exploit inouï donc improbable. Alors, ils inventeront de grotesques théories du complot. Comme chaque fois qu’un personnage célèbre meurt, un Elvis ou une Marilyn, ils n’arrivent pas à accepter la vérité aveuglante de simplicité. Pitoyables humains ! Ils traîneront ma mémoire dans la boue. Mais un jour, mon nom immortel sera réhabilité, comme l’unique qui a tenté d’arrêter la guerre. Je suis un précurseur révolté, un prophète politique.

            Ah ! Voilà le cortège présidentiel ! Il s’agit de ne pas trembler… Du sang-froid ! Pour venger Cuba assiégée par les impérialistes ! Pour faire cesser la guerre du Vietnam ! Un jour, des rues et des places porteront le nom du précurseur révolté, Lee Harvey Oswald…

           
FIN

 Source principale d’inspiration : le rapport de la commission Warren de 1964, particulièrement la biographie de Lee Harvey Oswald :

http://www.aarclibrary.org/publib/jfk/wc/wr/html/WCReport_0200a.htm

 C’est une biographie remarquable. Elle trace le parcours et le portrait psychologique saisissant de LHO : son enfance difficile, son caractère, ses motivations, ses actes… Un véritable personnage de roman !

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vendredi 16 septembre 2011

Critique littéraire : Je suis légion – BD

Scénariste : Fabien Nury

Dessinateur : John Cassaday

Éditeur : Les Humanoïdes Associés

Années : 2004-2006-2007 (3 tomes)


Il s’agit d’un thriller fantastique. L’action se déroule simultanément à Londres et en Roumanie, en plein cœur de la seconde guerre mondiale.

Le graphisme est très bon. Les personnages sont fouillés. L’histoire est complexe, donc assez compliquée, ce qui est classique pour un thriller mâtiné d’espionnage. Elle n’est pas réaliste, mais là aussi c’est usuel quand on aborde le domaine du fantastique. D’ailleurs en fiction, on cherche rarement le réalisme. Surtout, le scénario est prenant.

L’histoire est glauque, la violence est crue voire gore, aussi cette bande dessinée s’adresse à des lecteurs avertis, à partir de 16 ans.

Tiré de la trilogie, un film français serait en préparation.

Conclusion : c’est une BD de qualité, je la recommande.

Et maintenant, place aux illustrations !





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Critique dite littéraire : L’orchestre des doigts de Yamamoto Osamu (Manga)

mercredi 14 septembre 2011

Critique dite littéraire : Les Navigateurs de l’Infini par Rosny Aîné

« Les Navigateurs de l’infini » est un roman de science-fiction écrit en 1925 par J.H Rosny Aîné. L’écrivain, connu surtout pour « La guerre du feu », était non seulement un immense auteur de romans préhistoriques mais aussi un des pionniers de la science-fiction.

Ce court roman relate les aventures de trois astronautes qui débarquent sur la planète Mars et se mêlent des luttes entre les deux espèces dominantes qui peuplent la planète. À noter que le mot astronautique aurait été inventé ou popularisé par Rosny Aîné dans cet ouvrage. Il est depuis passé dans le langage.

Le style du roman est à la fois concis et poétique. La romance n’est pas absente de l’œuvre : le héros tombe amoureux d’une martienne à la beauté féérique. Leur amour reste platonique en raison d’importantes différences morphologiques, quoique…

L’histoire paraît de nos jours un peu convenue, parce que tant d’auteurs se sont inspirés depuis de cette trame mais à l’époque où il est paru, 1925, ce genre d’histoire de science-fiction était très novateur.



Disponible en ebook gratuit :


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lundi 12 septembre 2011

Nouvelle courte : le précurseur révolté - Première partie

    Le narrateur est un personnage historique célèbre. Pouvez-vous deviner qui ?


            L’heure du bilan est amère. J’ai connu de l’intérieur les deux systèmes, capitaliste et communiste. Ils sont aussi abjects l’un que l’autre. J’ai échoué presque tout ce que j’ai entrepris. Le travail, les amis, les loisirs, la politique, tout a foiré. Je ne me sens bien dans aucun pays. Je suis un éternel insatisfait comme dit ma femme, un idéaliste.

            Pourtant, j’aime mon épouse et mes enfants. C’est le seul regret que j’emporte, car ma famille est ma seule réussite. En partant au travail ce matin, j’ai laissé à Marina tout l’argent qu’il me restait, ainsi que mon alliance. Mon cœur reste ainsi auprès d’elle, mais mon corps ne la reverra pas.

            Ils m’ont tous rejeté. Ils n’ont pas compris ma valeur. Les hommes m’écœurent. J’ai raté le présent, je vais réussir le futur : je vais rentrer dans l’Histoire. Je suis un précurseur.

            À l’armée, ils ne m’ont enseigné qu’une chose : tuer ! Je vais enfin assouvir la violence en moi pour une juste cause.

            Des masses de gens acceptent passivement l’oppression, comme des moutons apathiques. Ils me dégoûtent. Moi, je me lève, seul, et je me révolte ! Je sacrifie tout !

            Un homme peut entraîner deux pays dans une guerre, causant des millions de morts et des souffrances infinies. Cet homme, le pire des criminels, ne sera pas inquiété, pourvu qu’il gagne la guerre. Moi, seul contre tous, je vais le punir, et peut-être faire cesser cette guerre absurde, sauver des millions de vies ! Un jour, les hommes comme lui devront rendre des comptes, quand les mentalités auront évolué. Je suis un précurseur solitaire.

  

Fin de la première partie

Seconde et dernière partie



vendredi 9 septembre 2011

Critique dite litteraire : L’orchestre des doigts de Yamamoto Osamu (Manga)

Ce manga en quatre tomes paru aux débuts des années 90 est atypique. La plupart des mangas traitent d’action violente et débridée, et se contentent de recycler deux ou trois bonnes idées à chaque volume. L’orchestre des doigts se démarque de cette ligne classique de belle manière.

L’histoire de ce manga hors du commun est celle d’une école japonaise d’Osaka de sourds-muets.

La saga s’étend sur une bonne partie du XXème siècle, centrée sur le professeur Takahashi qui voue littéralement sa vie à aider les sourds-muets à surmonter leur handicap. Dans un contexte social très agité, les péripéties bouleversantes n’épargnent pas les élèves de Takahashi.

D’abord, les gens de l’époque voyaient les sourds-muets comme des pestiférés, des attardés mentaux honteux. Les « braves gens » n’aiment pas que l’on soit différent.

Ensuite, après un tremblement de terre, les Japonais de Tokyo, peu portés à la tolérance dans la première moitié du XXème siècle, massacrent les émigrés coréens. Le pogrom fait plusieurs milliers de morts. Les assassins démasquent les infortunés Coréens en leur faisant répéter une phrase japonaise que les étrangers coréens ont du mal à prononcer correctement. Alors, malheur aux sourds-muets japonais ! Comme ils ne peuvent pas parler, ils sont occis illico.

Enfin, en toile de fond, il y a une lutte entre deux écoles : le langage des signes dont le champion toutes catégories est Takahashi, et la lecture labiale. Certains sourds-muets arrivent en effet à lire sur les lèvres et à parler. Cela paraît un progrès spectaculaire, car ils peuvent mieux s’intégrer dans la société, leur handicap passant presque inaperçu. L’aspect sensationnel de la méthode oraliste est si fulgurant que les autorités politiques décident de faire disparaître la langue des signes appelée aussi méthode gestuelle. Grave erreur ! Car moins d’un sourd-muet sur trois arrive à développer la lecture labiale. Takahashi se bat pour que les autres ne soient pas laissés sur le bord de la route.

De drames en victoires, de désillusions en rebondissements, la saga se poursuit. Elle dégage une émotion poignante et nous apprend beaucoup sur le sujet des handicaps liés aux sens. Elle constitue un miroir fascinant de la société japonaise de la première moitié du XXème siècle, qui, à l’aune de nos critères actuels, paraît infâme et préfigure la Seconde Guerre Mondiale.


mercredi 7 septembre 2011

Comment gerer l’addiction aux jeux video des enfants.

Pendant les vacances, un seul loisir intéresse mes jumeaux de douze ans : les jeux vidéo. Aucune activité ne trouve grâce à leurs yeux, en dehors de leur passion. Pour en avoir discuté avec quelques parents et grands-parents, je pense c’est un souci assez répandu.

La difficulté pour les parents est de définir une règle à laquelle les enfants adhèrent. On peut autoritairement fixer le temps de jeu quotidien à un faible nombre d’heures. Mais le mieux est d’obtenir l’approbation de l’enfant par un système incitatif plutôt que répressif. Il faut faire preuve de subtilité psychologique, une des facettes de l’éducation réussie.
 

Plutôt que de décréter « Pas de jeux vidéo si on ne fait pas d’abord d’autres activités », règle qui risque de les inciter à bâcler une vague activité de mauvaise grâce avant de se remettre à leur passion, j’ai imaginé le système suivant :

  • Pas d’activité : 2 heures de jeux vidéo dans la journée
  • Petite activité : 3h30 de jeux vidéo dans la journée
  • Activité moyenne : 4h30 de jeux vidéo dans la journée
  • Grande activité : 6h de jeux vidéo dans la journée.

Petite activité : en général un jeu d’adresse en plein air : frisbee, pétanque, ping-pong…

Activité moyenne : typiquement un vrai sport : footing, parcours sportif…

Grande activité : ce n’est jamais arrivé. On la garde en tant qu’idéal inaccessible.

L’enfant est ainsi incité à proposer lui-même des activités pour gagner du temps de jeu. Il va de soi qu’il doit mettre de l’entrain dans les activités sous peine de voir le quota de jeux vidéo baisser.

Ce système incitatif, carotte plutôt que bâton, fonctionne très bien. Mes enfants l’acceptent sans rechigner !

Et vous, comment gérez-vous la passion de vos enfants ?

lundi 5 septembre 2011

Nouvelle courte : Rupture !

             Je ne regrette rien. Il fallait vraiment changer de vie. Je n’en pouvais plus de la routine, du stress et des problèmes d’argent, sans compter les tensions conjugales.

Alors je suis parti, j’ai tout abandonné ! J’étais obligé de quitter mes proches. Le plus dur, ce fut de faire mes adieux à ma mère. D’ailleurs je n’y suis pas parvenu. Pour ma femme et mes enfants, j’ai trouvé le courage. Leur stupeur et leur douleur furent atroces, mais je suis convaincu qu’ils sont mieux à présent. Ma maîtresse, je lui ai juste envoyé un texto. Elle m’a déçu. Un jour je reviendrai lui faire sa fête.

            Avant, j’avais des voix dans ma tête. Mais attention ! Je ne suis pas schizophrène, je suis sain d’esprit. J’ai juste une tendance schizoïde, parce que j’ai beaucoup d’imagination. Un ange du Seigneur me chuchotait de couper les ponts, de vivre enfin ma légende personnelle. Maintenant je suis une légende. Et la voix ne me harcèle plus. Je suis en paix avec moi-même, et surtout avec Dieu. C’est Son ange qui m’a guidé. Se peut-il que j’ai été choisi comme prophète ?

            En fait, je n’ai pas le temps de mener une introspection approfondie à ce sujet. Ma priorité est de rester furtif : je ne veux pas retourner dans mon ancienne vie ! En partant, j’ai laissé des indices indiquant que j’allais me suicider. Peut-être que la police va mordre à l’hameçon. Ils sont tellement nigauds dans la police ! À croire que le Seigneur ne bénit pas avec équité toutes ses créatures…

            Pour ne pas me faire repérer et voyager économique, je suis parti avec un peu d’argent, un sac à dos et je roule sur un vélo-tout-terrain. Je me joue des frontières des hommes, passant par la forêt quand cela me chante. En route vers l’est ! Sibérie ou Ukraine. Qui me retrouvera dans ces contrées distantes ?

            On dit que les voies du Seigneur sont impénétrables. Mais c’est parce que les rares croyants qu’il subsiste en cet âge infidèle manquent de piété. En pratiquant certains rituels, un homme sincère et pieux peut entrer en communication avec le Ciel et ses anges.

            Je vis en communion avec la nature, libre, ascétique, solitaire, sportif, mon âme enfin au calme, tel Thoreau, le philosophe naturaliste mythique. Je suis un mythe. Je ne regrette rien. Avant, je m’appelais Xavier Dupont de Ligonnès.

samedi 3 septembre 2011

Critique dite litteraire : Les memoires de Tibere de Allan Massie

Le titre original est « TIBERIUS ». On peut penser que le traducteur français a voulu faire le pendant avec « Les mémoires d’Hadrien » de Marguerite Yourcenar.

 Massie a imaginé ce qu’aurait pu être les mémoires de Tibère si le fils adoptif d’Auguste qui lui a succédé comme empereur romain les avaient rédigées.

L’auteur prend le parti de tenter de réhabiliter Tibère dont la réputation de cruauté a quelque peu terni la fin de son règne. Il fait le choix de faire passer Tibère pour un homme sincère, peu enclin aux manœuvres politiciennes d’Auguste dont il a lui-même parfois fait les frais.

Le style est sobre, axé avant tout sur les pensées de Tibère. Il n’y a aucune description physique des personnages ou presque. Je trouve ce choix pertinent car sauf si le physique est atypique, le décrire n’apporte pas grand-chose. De même, Massie ne cherche pas à décrire les décors ni les coutumes des Romains, comme si Tibère écrivait pour ses contemporains qui connaissent le monde qui les entoure. Cela lui permet de concentrer l’attention du lecteur sur la psychologie des personnages, les dialogues et les monologues intérieurs du prince devenu empereur.

Tibère fut un général exceptionnel, victorieux de maintes campagnes. Devenu empereur, il a renfloué massivement les caisses de l’empire. C’est un gestionnaire avisé comme lui qu’il nous faudrait aujourd’hui pour sauver un certain nombre d’États de la banqueroute !

 De même dans le domaine militaire, il a eu la sagesse de reconnaître qu’il était vain et ruineux de tenter de soumettre la Germanie, conclusion à laquelle César était déjà parvenue dans la Guerre des Gaules. Là encore, c’est un stratège perspicace comme lui qu’il nous faudrait pour sortir du bourbier afghan, et pour nous éviter de nous empêtrer à la première occasion dans une nouvelle intervention militaire ruineuse, meurtrière et stérile.

Un ouvrage convaincant et agréable à lire, qui donne envie d’approfondir le sujet en lisant une biographie de cet empereur unique, qui par deux fois, s’est retiré de Rome, las de ses intrigues oppressantes.

vendredi 2 septembre 2011

La douche froide

J’avais trouvé un éditeur pour mon premier roman qui devait paraître en octobre. Nous avions même dûment signé le contrat juridique sensé nous unir.

Et voilà que l’éditeur m’appelle hier pour m’annoncer que finalement, non, il ne publiera pas mon roman parce qu’il est trop orienté pour la jeunesse alors que son lectorat est adulte…

Déjà l’argument se discute parce que bien des œuvres pour la jeunesse sont en fait pour tout public (Bilbo le Hobbit, Harry Potter, les aventures de Tom Sawyer…). Mais bon, c’est son droit.

Mais nom d’un chien, pourquoi ne me l’a-t-il pas annoncé avant de signer le contrat ! Quel manque de sérieux et de professionnalisme ! Et quelle déception pour moi !

Enfin, à quelque chose malheur est bon : j’ai vécu sur un nuage cet été, croyant que j’allais être publié.

 Et puis, je dois persévérer. Mon second roman est presque achevé. Cette fois, il cadrera mieux avec les fichues politiques éditoriales rigides (enfin, rigides pour les auteurs inconnus).

Pour la jeunesse, les éditeurs souhaitent que le héros soit un enfant ou un ado afin que le lecteur s’identifie à lui. Excellente idée mais qu’ils devraient appliquer avec souplesse. Après tout, le roman pour la jeunesse qui s’est le plus vendu au monde est Bilbo le Hobbit dont le héros est un adulte.

Pour passer cet écueil, le héros de mon second roman est un ado de seize ans.

Quant à mon premier roman, je pense que je vais l’auto-publier sur le Kindle Store quand il va débarquer en France d’ici la fin de l’année.



Courage Lordius, tu vas y arriver !