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vendredi 14 février 2014

Critique : Gil Jourdan l’intégrale, volume 1 par Maurice Tillieux (Bande dessinée)


Éditeur : Dupuis
Date de parution : fin des années cinquante
Genre : BD de détective humoristique 

Dans les années cinquante et soixante, l’école belge produisait les meilleurs BD du monde pour la jeunesse et aussi pour la vieillesse. Avant de sortir en album, les plus savoureuses d’entre elles étaient publiées en feuilleton dans les deux magazines vedettes de l’époque : Tintin et Spirou.

Chez Spirou officiait l’éditeur Charles Dupuis. Non seulement il était un dénicheur de talents sans pareille, mais en plus il s’immisçait dans les créations de ses poulains, souvent pour le meilleur. La grande vedette, c’était Franquin qui avait donné le nom à l’hebdomadaire. Aux côtés du père, il y a avait le fils et le sain esprit : Roba et Peyo. Et puis, pullulait une pépinière de talents dont Marc Tillieux fut le plus brillant représentant.

Marc Tillieux était un artiste complet : romancier, scénariste et dessinateur. Sa meilleure création est la série des Gil Jourdan, 15 albums de 1956 à 1973.

Gilbert Jourdan est un jeune détective privé bardé de diplômes, d’intelligence et d’agilité physique. Sa morale irréprochable et ses façons pince-sans-rince sont tintinesques. Un tel personnage seul serait ennuyeux : trop lisse ce gendre idéal, trop parfait, pas humain. Alors il s’entoure de deux faire-valoir. Libellule est un ancien cambrioleur repenti, l’âme damnée de Gil. Cerveau miniature (sauf nécessités de l’intrigue) mais attachant. Il fait des calembours dont lui seul rit. De toute façon, Jourdan ne rit jamais, ne boit jamais, ne fume pas, ne b… etc. L’inspecteur de police Crouton, c’est le bouffon par sa maladresse physique, mais par contre il assure intellectuellement. Bref, ce trio se complète. Leurs aventures mêlent rebondissements et humour.

Le dessin, il faut le dire, n’est pas le point fort de Tillieux. Il s’inspire du style Franquin sans parvenir à égaler le maitre. D’après ce qu’il raconte dans un interview, c’est Charles Dupuis qui lui a demandé ce style caricatural (les têtes des personnages sont disproportionnées par rapport au reste du corps comme chez Franquin) alors qu’il se sentait plus en phase avec le style réaliste d’Hergé.

La force de Tillieux, c’est le scénario. La psychologie des personnages. L’intrigue, bien sûr. Mais surtout les dialogues. Tillieux, c’est l’Audiard de la BD, le Lauzier pour la jeunesse. Les dialogues sont si cocasses et percutants qu’ils en deviennent irréalistes : on imagine mal le clampin de base avoir autant d’esprit. Tous les persos renvoient la balle chez Tillieux. C’est savoureux. Il possède aussi l’art de découper l’histoire en cases, le point fort d’Hergé.

Le volumineux tome 1 cartonné de l’intégrale propose les quatre premières aventures de Gil Jourdan : Libellule s’évade, Popaïne et vieux tableaux, La voiture immergée et Les cargos du crépuscule. En introduction, on a droit à une passionnante biographie de Tillieux, illustrations à l’appui, présentant sa vie artistique, donc, et aussi la genèse de Gil Jourdan.
 
 

mercredi 1 janvier 2014

Critique : Texas Cowboys (bande dessinée)


Une p'tite critique de BD de qualité (la BD, pas la critique) pour bien débuter l'année. Et la finir aussi, ce blog est en bout de course.
 
Sous-titre : The Best Wild West Stories Published
Scénariste : Lewis Trondheim
Dessinateur : Matthieu Bonhomme
Date de parution : 2012
Genre : Western
 

Son titre sonne comme un pulp américain. Son sous-titre transpire encore plus le vintage. Le style du dessin est au diapason, évoquant les bandes dessinées de la première moitié du XXe siècle. Et pourtant ! Texas Cow-boys possède tous les qualités qu’on est en droit d’attendre d’un art qui a tant progressé depuis un siècle.

Le dessin, vaguement naïf au premier abord, est en fait bien expressif, efficace et tout simplement esthétiquement formidable grâce notamment à une palette de couleurs digne d’une peinture. Les tronches des personnages sont saisissantes. On les garde en mémoire au fil du récit, ce qui renforce l’intrigue.

Alors l’intrigue, parlons-en parce que c’est vraiment le point de ce chef-d’œuvre. Trondheim fait preuve d’une maitrise narrative consommée. On suit les péripéties croisées de plusieurs personnages, avec parfois des flashbacks ou son contraire que nous appellerons flashforward. En général, ce type de construction d’histoire est casse-gueule : on a du mal à suivre, on est dans le flou pendant longtemps, il faut faire des efforts de mémoire. Mais pas avec Trondheim ! C’est fluide et passionnant ! Du punch et du suspense !

L’histoire ? Il y en a plusieurs. Parlons de la principale : un pied-tendre de l’Est débarque au Far-West, à Fort Worth. Il est chargé de faire un reportage, mais ce n’est pas son objectif. Il est venu pour retrouver le second mari de sa mère qui a plumé celle-ci, se marier et faire fortune.  Écoutons les conseils avisés d’un vieux cowboy du cru à qui il s’est confié :

— On peut pas v’nir dans l’Ouest pour la vengeance, la fortune et l’amour, ça fait trop. C’est n’importe quoi. Il faut choisir pour rester concentré. Qu’est-ce que tu veux le plus ? Le fric, niquer ou te venger ?

— Euh… Mettons l’argent. Je pourrai toujours acheter le reste après.

— Voilà un bon p’tit Américain.
 



lundi 11 novembre 2013

Critique : Bakuman (manga)


Nombre de volumes : 20
Scénariste : Tsugumi Ōba
Dessinateur : Takeshi Obata
Date de parution : 2008-2012 au Japon
Genre : Shônen et romance 

Mashiro possède un don pour le dessin. Il veut suivre la voie de son oncle qui fut mangaka. Takagi, le premier de la classe, écrit des scénarios. La passion du manga et l’ambition dévorante les rapprochent. Du haut de leurs 14 ans, ils décident de devenir des mangakas professionnels. Mieux, même ! De devenir les meilleurs. Et vite ! Avant 18 ans, parce que Mashiro a hâte de se marier. Or sa romantique dulcinée lui a interdit de l’approcher tant qu’il n’a pas percé. Alors, il est motivé à fond !

Ce manga, dont un anime a été tiré, a connu au Japon un immense succès, plus de quinze millions de copies vendues. Pourquoi ?

Pas grâce au dessin, à mon avis. J’ai calculé que le dessinateur a produit un tome tous les deux mois, soit cent planches par mois ! Même avec une armée d’assistants, le résultat ne peut être que médiocre, bâclé et stéréotypé.

L’intérêt vient de l’originalité du scénario. Un manga de type shônen s’adresse aux garçons, enfants et adolescents. Or Bakuman comporte aussi un thème romance apte à séduire les jeunes filles (manga de type shôjo).

On y trouve certains stéréotypes du genre nekketsu : jeunesse du héros, rêve idéaliste, pureté, exaltation extrême. Par contre, l’univers n’est pas l’habituel fantastique manichéen affublé de monstres à combattre. L’histoire se passe dans le Japon quotidien, sans violence ni action physique. Ainsi les jeunes lecteurs peuvent s’identifier à ces deux héros ou à leur fiancée respective.

Qui n’a pas rêvé de percer comme artiste ? Devenir dessinateur ou scénariste ? Mangaka, la classe ! Ce manga du manga permet de s’instruire en se divertissant. Même si l’histoire est fictive, elle nous éclaire sur le monde professionnel des mangakas. Elle propose surtout à partir du tome 2, des pistes de réflexion sur l’art de raconter une histoire et sur le ciblage d’un public.

En outre, il est naturel que le jeune lecteur identifie les deux héros aux deux auteurs. L’impression d’autobiographie renforce habilement la crédibilité de l’histoire qui en a souvent bien besoin... Mais quoi ! Il faut bien transcender la basse réalité, et Ōba y parvient à merveille.

À noter que Ōba est un pseudo : le scénariste cache habilement sa vraie identité, on ne sait même pas si c’est un homme ou une femme. Je dirais plutôt une femme. L’anonymat ne doit pas simplifier la promotion, mais bon…
 
 


 

mercredi 2 octobre 2013

Critique : Le client (bande dessinée)


Scénariste : Zidrou (auteur de l’élève Ducobu)
Dessinateur : Man
Éditeur : Dargaud
Date de parution : 2013
Genre : Thriller romantique et sordide à la fois 

Quelque part dans un coin d’Espagne interlope, un homme fréquente un bar à putes. Il tombe amoureux de l’une d’elles. Elle aussi, semble-t-il. Il veut la sortir de là, mais l’organisation veille. Alors cet homme amoureux enlève la fille du chef de l’organisation.

On s’identifie facilement au personnage principal. Il n’est ni beau ni doué pour l’action contrairement à la coutume. Il est petit, binoclard, étriqué d’épaules et gras du bide. C’est monsieur tout-le-monde. Sincérité, émotion et authenticité baignent cette fiction : on s’y croirait.

Il n’est pas le modèle courageux. Pourtant, pour sauver sa dulcinée, il est prêt à charger les moulins de la pègre. La passion amoureuse qui fait prendre tous les risques, voilà un thème délicieusement romantique.

Concernant le dessin, la mise en scène, l’expressivité des personnages, les couleurs : tout est réussi. J’apprécie particulièrement les dominantes de couleurs par scène et souvent par planche qui donnent au récit une sorte de rythme poétique visuel comme dans Les sentinelles. Les flashbacks sont indiqués par des bordures de case noires, le présent est classiquement en blanc, autre initiative heureuse.

Le dessin livre un maximum d’information et d’expressivité par case, une densité qui illustre « un dessin vaut mille mots ». Les scènes, même brèves sont donc très suggestives. La maîtrise narrative et picturale des deux auteurs est tout simplement remarquable. Avec eux, le roman graphique est un art majeur. Le meilleur de la BD européenne, rien de moins.
 
 




 

mardi 3 septembre 2013

Critique : Morgan (Bande dessinée) de Segura et Ortiz


Titre : Morgan
Sous-titre : T.1 : Repose en paix
Scénariste : Antonio Segura
Dessinateur : José Ortiz
Éditeur : Soleil Productions
Date de parution : 1989-1993
Genre : roman graphique noir d’encre 

Le brillant commissaire quinquagénaire est en bout de course. Il a une balle logée près du cœur. Sa femme l’a quitté parce qu’il ne peut plus prendre le risque de faire l’amour : son palpitant pourrait lâcher. Il lui reste sa fille. Mais voilà, un gang l’assassine. Alors il se fâche vraiment, notre fort de l’ordre. Lui qui a été réglo toute sa vie, qui n’a même pas cherché à se faire justice quand un malfrat lui a logé une bastos calibre 45 dans le poitrail, cette fois il fait un carnage. Il n’hésite pas notamment, à tuer le frère innocent du malfrat pour descendre celui-ci à l’enterrement. Ce garçon n’a plus de cœur… On est dans l’archétype du genre noir. Il n’y a d’espoir pour personne. Souffrance, ennui ou mort brutale, voilà le programme.

On retrouve le thème classique de la vengeance qui libère et assouvit, quel qu’en soit le prix. Et le prix est lourd. Condamné à perpète. Un flic au milieu des taulards, ça va être sa fête. Mais lui n’a plus rien à perdre, même pas la vie, ce mort en sursis. C’est ce qui le rend si dur de dur.

L’histoire est habilement découpée en épisodes autonomes. Comme un recueil de nouvelles graphiques, une série dont le fil conducteur est le pénitencier. Comme souvent pour aboutir à un chef-d’œuvre, on a sous les yeux le fruit d’une magnifique synergie entre le dessinateur et le scénariste : histoire et dialogues scotchants, dessin énergique et chargé d’émotions et d’atmosphère. Glauque, effroyable, cette atmosphère, mais prenante. Elle nous aspire dans un tourbillon de haine, violence, enfer carcéral, mais aussi solidarité, amitié et loyauté.

Comme toute œuvre noire, Morgan ne se laisse approcher que par les lecteurs avertis.
 
 


 

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mercredi 7 août 2013

Critique : Les sentinelles (BD) par Dorison et Breccia


Titre : Les sentinelles (volume 1)
Sous-titre : Chapitre premier : juillet-août 1914. Les moissons d’acier
Scénariste : Xavier Dorison
Dessinateur : Enrique Breccia
Éditeur : Robert Laffont
Date de parution : 2008
Genre : Fantastique & historique ou science-fiction & guerre ou BD de super-héros

Début des années 1910. L’armée française renonce à ses expériences de prototype de super-soldat : la technologie n’est pas au point et, aussi, les généraux sont trop cons. Été 1914 : les généraux sont toujours aussi cons, mais la technologie a évolué. Hélas ! Le scientifique pacifiste refuse de vendre son invention à l’armée. Sur ces entrefaites, la guerre éclate et notre idéaliste est grièvement blessé au front. Pour éviter la mort, il accepte de devenir Taillefer, la nouvelle sentinelle.

Entre parenthèses, ça me fait penser à la blague de Pierre Desproges qui cible la guerre d’après : « En 39, tout le monde savait que Gamelin était un con, sauf les militaires. C’est ce qu’on appelle un secret militaire. » C’est là qu’on se rend compte de l’infamie des Allemands de l’époque, l’un de leurs plus grands crimes de guerre : ils nous ont rendu Gamelin intact en 45, après avoir tué des millions d’autres humains… Fin de la parenthèse.

Cette bande dessinée reprend un thème devenu classique, l’homme bionique. Elle réussit cependant à traiter ce thème avec une grande originalité puisque l’action se passe en 1914. Il s’agit donc d’une sorte de science-fiction vintage, laquelle s’immerge, autre originalité passionnante, dans un récit historique de guerre ultra-réaliste.

Le scénario est vraiment époustouflant et très abouti. Les personnages possèdent une profondeur psychologique et évitent tout manichéisme. Un grand soin a été apporté aux recherches historiques et même à l’aspect scientifique : la manière dont les super-soldats sont façonnés est expliquée avec luxe de détails, sans que cela devienne barbant. Du grand art.

Le docteur qui fabrique les super-soldats et fait des expériences si cruelles sur les animaux, on hésite entre Mengele, Frankenstein et un patriote qui ne pense qu’à sauver son pays. Et Djibouti le vieux légionnaire au corps cassé, ancien cobaye volontaire du doc, ça le dégoûte de tuer des jeunes hommes allemands mais d’un autre côté, il kiffe de faire son mâle dominant. La guerre, c’est plein de dilemmes qui vous déchirent le cœur, mais sans elle, qu’est-ce qu’on s’emmerderait…

Le dessin est au diapason. Les couleurs, formidables, évoquent à la fois les BDs de super-héros et des images d’Épinal. Mais le plus frappant, ce sont les visages. Beaucoup de dessinateurs de BD et de manga sont experts dans cet exercice imposé. Mais Breccia les surpasse. Ces visages taillés à la serpe, on ne les oublie pas une fois l’album refermé. Il les dessine souvent montrant les dents. Ça leur donne un air féroce de carnivore, cruel, satanique même, mais énergique aussi.

À propos des couleurs, on s’aperçoit que chaque planche possède une couleur dominante. Ce procédé permet de donner une ambiance et un rythme à chaque scène. Il est d’autant plus remarquable qu’il est difficile de faire coïncider les couleurs dominantes avec chaque planche. C’est une contrainte qui donne corps au récit, comme les pieds et les rimes donnent corps à un poème. Cette BD est comme un poème graphique moderne.

Au total, une bande dessinée vraiment époustouflante. Trois volumes sont sortis. Le volume 2, c’est la bataille de la Marne. J’imagine le suspense de fou, parce que quand même, le sort de la France se joue entre les mains métalliques de Taillefer, ce super-héros à la française. Pour lecteurs avertis.




 

  

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mercredi 17 juillet 2013

Critique : Shutter Island, la bande dessinée


Scénario et dessin : Christian de Metter
Tiré du roman de Dennis Lehane
Date de parution : 2009
Genre : thriller psychologique noir 

C’est le propre des chefs-d’œuvre que d’inspirer magnifiquement ceux qui les adaptent sur d’autres supports. Comme Martin Scorsese l’année suivante (film sorti en 2010), Christian de Metter a donné le meilleur de lui-même pour se hisser à la hauteur du roman de Dennis Lehane (best-seller sorti en 2003).

Début des années 50, région de Boston. Deux marshals fédéraux se rendent sur une île abritant un hôpital-prison pour dangereux psychopathes criminels. Nos deux détectives recherchent une malade qui s’est volatilisée. Elle a laissé une note cryptée. Tant de mystères recouvrent cette île secouée par la tempête… L’évadée a-t-elle bénéficié de complicité du personnel médical ? Qu’est venu chercher l’un des marshals qui semble connaitre un malade détenu dans l’île ? Les médecins pratiquent-ils des expériences louches sur leurs patients ? Une plongée sombre et angoissante dans l’univers de la folie attend le lecteur.

Shutter Island représente la quintessence du thriller psychologique : aucun des personnages n’est en réalité celui qu’il affiche au début de l’histoire.

L’adaptation en bande dessinée de Christian de Metter est remarquable à plus d’un titre. Les dessins d’abord, magnifiques, artistiques, frappants. La couleur sépia est un choix vraiment heureux, renforçant l’ambiance glauque de l’intrigue. Par contraste, les rêves du personnage principal sont en couleur. Encore une superbe idée. Concernant le scénario, les dialogues percutants sont saisissants de réalisme et d’émotion. En quelques cases, l’auteur arrive à restituer l’ambiance juste.

Ce qui m’apparait formidable, c’est que même quand on connait déjà l’intrigue, on est quand même scotché par cette bande dessinée. Pour ceux qui la découvrent, il est conseillé de la lire deux fois, afin de mieux appréhender la profondeur de l’œuvre.

jeudi 27 juin 2013

Critique de : Ikigami par Motorô Mase (manga)


Titre : Ikigami
Sous-titre : Préavis de mort
Auteur : Motorô Mase plus les petites mains appelées assistants
Éditeur : Asuka éditions
Date de parution : 2005 au Japon
Genre : Thriller d’anticipation contre-utopique
 
Cette société pourrait être la nôtre. À une exception près : un jeune sur mille est mis à mort automatiquement par un vaccin entre 18 et 24 ans. Le but est de faire apprécier la vie, dans ce monde au confort aseptisé. D’autre part, cette pratique réduit les suicides et la délinquance. On peut aussi y voir une métaphore de la guerre, endémique chez les humains, qui moissonne la jeunesse, souvent sans raison valable.

Le thème fait penser à Hunger Games, sauf que là, le jeune n’a aucune chance de s’en sortir et puis ça se passe de nos jours. On s’identifie donc mieux à cet univers.

Le personnage principal n’est pas un de ces jeunes qui cherchent à échapper à la mort, genre thriller haletant. D’ailleurs il est impossible aux jeunes victimes expiatoires d’échapper à leur funeste destin. Le personnage central est un fonctionnaire qui vient annoncer aux malheureux qu’il leur reste 24 heures à vivre. Il leur remet leur préavis de mort pour que les condamnés vivent à fond leur dernière journée. Si possible sans faire de dégâts, sinon c’est leurs parents qui morflent.

Le tome 1 raconte le dernier jour de deux jeunes. L’intrigue et la psychologie des personnages sont tout à fait remarquables. On est dans la tragédie, mais la tragédie subtile, pas le mélodrame. Plutôt le psychodrame.

Dans le tome 2, l’auteur fait un parallèle choquant et réaliste avec la guerre. L’État demande le sacrifice de sa jeunesse en cas de conflit. Souvent, la nécessité n’est pas plus claire de faire la guerre que d’injecter la mort programmée à un millième. L’État est un ogre, même en démocratie. Il exige parfois le sang de sa jeunesse (guerre) et toujours sa sueur (impôt).

Les dessins sont tout simplement époustouflants de réalisme et d’émotion. On est à des années-lumière des mangas bâclés qu’on désigne d’habitude pudiquement du terme dessin stylisé. Les expressions des personnages, les décors même, tout est réussi. D’autre part, les Japonais ont des têtes de Japonais et ça renforce le réalisme. Il est courant dans les mangas de représenter les personnages japonais sous des traits européens. Mais, quand par exemple au sein d’une famille japonaise campagnarde des années 40, la fille est une Blanche blonde, ça le fait pas. Ici, pas de ça, on y croit, on est immergé, pris aux tripes et au cœur.

Globalement un manga époustouflant pour adultes, dont un film a été tiré au Japon.




 

 

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mercredi 5 juin 2013

Mon avis sur : Les aigles de Rome, de Marini (bande dessinée)


Éditeur : Dargaud
Date de parution : 2007 pour le tome 1
Genre : Aventures érotico-épiques dans la Rome antique

L’histoire se passe au temps du premier empereur romain, Auguste, vers l’an zéro. Deux jeunes hommes unissent malgré eux leur destin. Un prince germanique bouillant guerrier dans l’âme et le corps, et un jeune Romain insolent mais sensible. Ils partagent les épreuves de l’éducation à la romaine et découvrent ensemble l’amour des femmes. Un grand destin les attend, on le sent.

Cette bande dessinée sonne juste. Les dialogues sont émaillés de grossièretés, exactement comme parlent deux adolescents à cent lieues du latin écrit de Cicéron et Virgile, qui d’ailleurs les rasent prodigieusement. La vie en ces temps nous est montrée crûment : esclavage, violence gore, tortures, sexe. Pour adultes donc.

Je ne suis pas spécialiste de la Rome antique, mais les décors comme les mœurs semblent bien restitués. En tout cas, on s’y croirait et c’est ça qui compte.

Les couleurs sont chatoyantes, le dessin magnifique. Certains visages sont particulièrement réussis, notamment celui, anguleux et austère, du père du jeune Romain. Cet homme représente l’archétype du Romain : courageux, travailleur, impitoyable, dévoué corps et âme à la grandeur de Rome et de ses légions. Un adepte du fameux « virtus » romain, qu’un certain manga a exploité bien moins finement que Marini.

Il est remarquable qu’un artiste seul, dessins et scénario, ait créé une histoire aussi prenante. Il semble que les rares auteurs de bande dessinée capables de réunir les deux talents, plume et crayon, réussissent les œuvres les plus populaires. Comme si réaliser une œuvre d’art à deux était plus difficile. Manque de cohésion peut-être. Les deux séries les plus vendues au monde sont Dragon Ball de Toriyama et Tintin de Hergé.





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mercredi 10 avril 2013

Juan Solo ou la bande dessinée cruelle


Tome 1 : Fils de flingue
Scénariste : Alexandro Jodorowsky
Dessinateur : Georges Bess
Éditeur : Les Humanoïdes associés
Date de parution : 1995
Genre : roman graphique noir 

Un bébé abandonné est recueilli par un nain difforme travesti et prostitué, dans un bidonville quelque part en Amérique Latine. Son enfance est un enfer. Son père adoptif, le nain, est battu à mort par des voyous sous ses yeux. Avant de s’éteindre, il lui lègue un vieux pistolet.

Alors, de victime l’enfant devient bourreau. Tel Tony Montana, il décide de gravir l’échelle asociale par n’importe quel moyen. Et ça y va : vols, viols, actes de barbarie, meurtres d’innocents. Il déchaine un enfer de violence pour parvenir à ses fins.

Le thème central est un classique : un homme à l’enfance particulièrement difficile est-il coupable de ses exactions ? Est-ce la société qui génère les pires monstres ?

Le dessin n’a rien d’exceptionnel, par contre les couleurs sont particulièrement réussies. Les teintes dominantes varient en fonction du décor mais aussi de l’atmosphère.

Le point fort de cette BD, c’est le scénario. Glauque, dur, hyper violent mais percutant. L’histoire est rondement menée, sans pour autant bâcler la psychologie des personnages. Du grand art. Dépaysement exotique sanglant garanti. Pas de risque de s’attacher à un personnage plus qu’un autre : tous des salauds amoraux, à commencer par Juan Solo. C’est peut-être le reproche qu’on peut faire : tous plus mauvais les uns que les autres à part le père adoptif de Solo qui conserve une once d’humanité. Peut-être est-ce Juan Solo qui attire les méchants durs à cuire partout où il passe, laissant derrière lui une trainée sanglante.

Tout est montré crument, sexe comme meurtres. Pas de tabous ni de chichis.

Pour personnes majeures à l’ancienne (21 ans).

 


 

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mercredi 20 février 2013

Critique de : Pin-up (Bande dessinée)


Scénario : Yann (alias Balac)
Dessin : Berthet
Éditeur : Dargaud
Date de parution : 1994
Genre : Aventures sarcastiques & amours chahutées 

Ils s’aiment. Lui part faire la guerre dans le Pacifique contre les Japonais pendant la seconde guerre mondiale. Il va lui arriver plein d’aventures tragi-comiques sur une petite île. Elle, oie blanche restée sur le sol américain, est morte d’inquiétude pour son chéri. Cornaquée par une garce cynique, elle devient serveuse dans un bar à soldats. Puis elle pose comme pin-up pour un dessinateur. Celui-ci la choisit comme égérie des bandes dessinées qu’il réalise pour une revue militaire. Or son chéri lit cette revue…

Rebondissements passionnants, personnages à la fois profonds et un peu caricaturaux (juste ce qu’il faut pour leur donner une forte personnalité), humour corrosif : un cocktail réussi pour cette œuvre originale et bien rythmée malgré un titre banal. Le dessin et les couleurs sont très réussis, particulièrement le regard des personnages. Exotisme, érotisme, cynisme : le triptyque de choc.

Exemple de scène entre l’oie blanche (magnifique rousse) et la garce cynique (non moins magnifique brune) :

Après le départ du chéri de l’oie blanche, la garce cynique découvre que son amie s’est fait tatouer. C’est l’époque de Noël.

Garce cynique : Se faire abîmer la peau pour un mec… Tu es cinglée, Dottie…

Oie Blanche : Évidemment, tu ne peux pas comprendre. Si tu devais te faire tatouer les initiales de tous tes amants, tes deux épaules, ton dos et jusqu’à la peau de tes fesses n’y suffiraient pas.

Garce cynique : Ma pauvre Dottie ! L’amour c’est comme un champ de bataille, ça se gère. Moi par exemple, je suis parée… Si ni Howard de la Navy, ni Foster de l’US Air Force, ni Ben l’artilleur ne reviennent, il restera toujours bien Philip ou David des signalisations…

Oie Blanche : Ça suffit ! Laisse-moi, je veux être seule. Merci pour le sapin.

Garce cynique : Ok, Ok ! À propos de sapin… N’oublie pas que c’est avec ses planches qu’on fait les cercueils ! Joyeux Noël !

 




  

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mercredi 23 janvier 2013

Critique : Les ailes de plomb (bande dessinée)


Scénario, couleurs, avions : Christophe Gibelin
Dessins : Nicolas Barral
Éditeur : Delcourt
Date de parution : 1996
Nombre de tomes : 3
Genre : Thriller action saupoudré d’un zeste de politique

 En 1958 en France, un ministre prépare un détournement d’avion en vol par télécommande, à des fins politiques. Les malfaiteurs qui ont acheté la précieuse télécommande se la font voler par une jeune femme. Très énervés, ils la pourchassent. Elle se réfugie dans un hôtel tenu par la mère du héros. Ça chauffe drôlement quand le malfrat débarque pour récupérer son bien, d’autant qu’il a lui-même aux fesses les commanditaires de l’attentat, le vol de l’avion très spécial étant imminent.

On visite avec plaisir la France de la fin des années cinquante, traumatisée par la fin de l’ère coloniale, la guerre d’Algérie, le retour imminent de de Gaulle, avant sa fuite courageuse en Allemagne (mais là, j’anticipe de dix ans).

La subtilité de la psychologie des personnages est remarquable. Pas de manichéisme, chacun a ses raisons d’agir : on est tous le salaud ou l’emmerdeur de quelqu’un d’autre.

Voilà une bande dessinée comme on aimerait en lire plus souvent : une intrigue béton, des personnages vivants et attachants, des dialogues croustillants, un dessin et des couleurs qui transcendent le tout. Le top de la BD européenne, un classique du genre.

La première série comporte trois volumes de qualité exceptionnelle. Je conseille de s’arrêter à cette trilogie. Les tomes suivants se font sans le dessinateur Nicolas Barral, et sans inspiration. On sent que Gibelin a voulu continuer seul coûte que coûte.

 



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mercredi 12 décembre 2012

Critique : Quartier lointain (manga), de Jirô Taniguchi


Éditeur : Casterman pour la version française

Date de parution : 1998

La collection Écritures de Casterman propose souvent des mangas de grande qualité.

Il a 48 ans, un peu alcoolo, assez usé par le boulot et la platitude de la vie quotidienne, comme tant d’autres. Sa mère est morte il y a 20 ans et son père a disparu quand il en avait 14. Soudain, coup de théâtre dans sa routine sclérosante, il se retrouve propulsé dans le passé, à l’âge de 14 ans, dans sa famille japonaise en 1964.

Au début, bien sûr, il est abasourdi. Ensuite, il est ravi : il retrouve le corps de sa jeunesse, avec sa conscience et son expérience d’adulte. Son entourage le trouve changé, forcément. Notre personnage principal les déroute, mais aussi les fascine par sa maturité. Puis vient le temps du doute : il a peur de changer le cours des événements puisqu’il se comporte différemment, un dilemme classique des voyages dans le temps. Paradoxalement, il voudrait bien modifier un élément-clé de sa vie : empêcher son père de partir du jour au lendemain sans donner d’explications ni laisser de traces.

Le thème du voyage dans le temps est archi rebattu, mais inépuisable. Ce qui compte, c’est qu’il soit traité avec finesse et talent. C’est le cas ici. Le personnage principal nous invite à des réflexions philosophiques sur la jeunesse, la façon dont elle voit les adultes et vice-versa. Car il se sent à la fois jeune et vieux.

Les personnages sont attachants et leur psychologie tient la route. L’intrigue est prenante.

Le dessin est magnifique. Très fin, surtout pour un manga dont les stéréotypes et les canons donnent en général un aspect certes vivant et énergique, mais produisent un dessin bâclé. Ce n’est pas le cas ici. Les paysages sont représentés avec précision et réalisme, les personnages sont bien expressifs, de visage comme de corps. Bref, c’est du beau dessin artistique.

Quartier lointain se raconte en deux volumes. Je ne dévoilerai pas ici l’intrigue de la suite pour ne pas gâcher le suspense aux futurs lecteurs du premier volume. Il suffit de dire que la seconde partie révèle une histoire incroyablement profonde, dramatique (carrément triste, mais réaliste), touchante voire bouleversante, et pleine de rebondissements à la fois plausibles et étonnants.

L’ensemble donne un manga touchant et profond, un chef-d’œuvre : le mot ne parait pas trop fort. Un roman graphique philosophique et d’une grande psychologie.



 
 
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mercredi 7 novembre 2012

Critique de : Kabbale par Grégory Charlet (bande dessinée)


Gaël est un jeune homme bizarre. Il fréquente une jeune femme à qui il n’ose déclarer sa flamme, malgré les exhortations de son meilleur ami, son miroir. Elle-même joue un jeu assez trouble : elle a déjà un copain, auquel elle ne semble pas tenir particulièrement. Mais Gaël, on l’a dit, est spécial, alors elle hésite, c’est bien naturel. D’autant que Gaël est affublé d’un caractère, disons… difficile qui ne favorise pas l’épanouissement de relations amoureuses sereines.
Notre héros est auteur de bandes dessinées. Il est révolté par ce qu’il perçoit comme les injustices de notre société. Idéaliste et fougueux comme seule la jeunesse en est capable, il veut changer le monde, rien de moins. Et en mieux, bien sûr. Dans ses moments de rêverie, il se voit enfant, en train de parler à un dragon très mystique qui lui demande de croire en lui afin de pouvoir changer le monde.
On ne sait pas si ces visions sont le fruit de son imagination débordante de créatif, ou bien si on est dans un univers fantastique. Ce suspense accroit l’intérêt du lecteur, c’est le but.
Avec son ami, Gaël participe à une manifestation anti-raciste qui dégénère. Il se fait tabasser grave. Alors il est morose, encore plus qu’avant. Un peu déboussolé, on le serait à moins.
Le personnage se révèle ambigu au fil des péripéties. Pacifiste mais capable de grande violence.

Où va cette histoire ? C’est ce que voudrait savoir le lecteur de cette intrigue prenante et déroutante.

Le dessin de type manga en couleur est accrocheur et efficace. Une œuvre originale à découvrir.

 
 

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mercredi 17 octobre 2012

Critique de Weëna (bande dessinée)


Scénario : Corbeyran
Dessin et couleurs : Alice Picard
Éditeur : Delcourt
Date de parution : 2003 pour le volume 1
Genre : Bande dessinée de Fantasy

 L’univers de la Fantasy, c’est la magie omniprésente, des humains affublés d’oreilles pointues, des animaux bizarres comme des mutants, qu’on dit fantastiques, une civilisation oscillant entre l’Âge de Fer et le Moyen Âge. Très classique, jusque-là.

L’histoire est dramatique : quand le bébé nommé Weëna nait, une prophétesse (on ne sait pas si c’est une sorcière ou un Esprit, mais elle est puissante, rancunière et pas commode du tout) affirme que si elle vit, le village dont son père est chef sera exterminé et des tonnes de malheurs s’ensuivront. Le papa envoie paître le rapace de mauvais augure, il aime son bébé et refuse la prophétie. Malheur à lui ! Malheur aux siens !

Mais pas tout de suite. L’enfance et l’adolescence de Weëna sont heureuses, elle s’éprend d’un berger, qui lui ne pense qu’à devenir guerrier, car il en a marre de garder ses bêtes bizarres dans la montagne. Il est en fait aussi bizarre que les herbivores qu’il garde : il n’est pas obsédé sexuel, comme beaucoup de jeunes hommes. Son trip, c’est de tuer d’autres hommes, mais des méchants bien sûr, des barbares qui menacent le royaume. La jeune fille envie sa liberté et sa solitude, mais lui s’ennuie et veut changer de vie, car on désire souvent ce qu’on n’a pas, alors que le bonheur de l’amour lui tend les bras, là, tout près. Par les Esprits ! Quel nigaud !

Weëna, qui est très attirante malgré ses cheveux gris (couleur cendre froide, d’après les dialogues) lui fait des avances qui tombent à l’eau. Alors elle l’embrasse par surprise, parce qu’elle a un caractère somme toute très masculin : énergique, rebelle, dragueur, presque agressif. Bon, quand il découvre le goût du baiser, le pâtre niais en redemande. Hélas ! C’est à ce moment que le super-méchant débarque… Il nous bousille la romance avec la dernière énergie…

Souffle épique, romance pas mièvre, tragédie, action violente, conflits et tensions de partout : l’histoire est prenante.

Le dessin est bon, mais pas transcendant. On a droit à la couleur, c’est quand même mieux qu’un manga, sur ce point au moins. Parce que si le dessin n’est pas extraordinaire, la couleur rattrape le coup.

Une très bonne BD globalement. Essayez le tome 1, vous verrez !
 


 

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mardi 9 octobre 2012

Critique : Le roi Léo par Osamu Tezuka (manga)


Éditeur : Glénat pour l’édition française
Titre original : Janguru Taite (L’empereur de la jungle)
Date de parution : 1950 pour la version originale (premier volume)
Genre : manga d’aventures animalières fantaisistes 

De son vivant, Osamu Tezuka était surnommé le dieu des mangas par ses compatriotes. Au début de sa carrière, il fut inspiré par les œuvres de Walt Disney, notamment Bambi dont il aurait vu le film 80 fois ! En retour, il inspira Le roi Lion. La boucle était bouclée.

L’histoire ? Au fin fond de l’Afrique, dans la jungle où règne la loi du même nom, un lion nommé Pandja, très fort, mais surtout très intelligent, lutte contre l’avancée dévastatrice des hommes blancs et noirs. Longtemps, il les tient en échec. Un jour, il tombe amoureux d’une lionne et les diaboliques hommes en profitent pour le tuer. La lionne a un bébé, Léo, qui parvient à s’échapper de captivité. Après bien des péripéties, il revient sur le territoire de son père. Hélas ! Les hommes lui ont inculqué d’autres valeurs que celles des animaux sauvages. Il doit mener un combat à la fois intérieur et contre les méchants humains tout en préservant les humains qui l’ont aidé. Un défi grandiose et titanesque l’attend.

Parmi l’œuvre immense et marquante du père des mangas modernes, Le roi Léo fait figure de classique voire de chef-d’œuvre. À sa parution en 1950, c’était d’une nouveauté et d’une fraîcheur renversante. Aujourd’hui encore, l’œuvre est saisissante. Combien de bandes dessinées de 1950 ont réussi cet exploit ?

L’humour y est omniprésent par le dessin presque animé comme par le texte. Les péripéties sont haletantes. Les personnages sont habilement ambivalents, comme dans toute l’œuvre de Tezuka. Le chasseur qui a tué Pandja, par exemple, est un ancien bourreau nazi. Mais il se révèle aussi un père de famille modèle et ses scrupules moraux l’honorent en maintes circonstances.

Comme beaucoup de grandes fictions, l’œuvre recèle plusieurs niveaux de lecture. Elle cible bien sûr les enfants. Toutefois sa profondeur en fait aussi une satire sociale voire un conte philosophique qui régaleront les adultes.

Trop peu connue des adultes français rebutés à juste titre par certains titres de mangas pour la jeunesse, l’œuvre de Tezuka mérite vraiment d’être découverte.


 
 

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mardi 18 septembre 2012

Critique : Trente jours de nuit (bande dessinée)


Scénariste : Steve Niles
Dessinateur : Ben Templesmith
Éditeur : Delcourt
Date de parution : 2003 pour la version originale anglaise
Genre : horror survival, horreur / épouvante
 

Il existe deux types principaux d’histoires de morts-vivants : les zombies depuis 1968, année du film culte La nuit des morts-vivants et les vampires depuis 1897, année du roman mythique Dracula de Bram Stoker.

Trente jours de nuit traite du second cas. Au fin fond de l’Alaska, dans un petit village isolé, des vampires attaquent. La nuit arctique y dure un mois, ce qui fait bien les affaires des vampires qui craignent la lumière du soleil.

Alors ils massacrent et se gavent de sang après avoir coupé les communications entre le village et le reste du monde. Seule une poignée de villageois se terre. Arriveront-ils à trouver un stratagème pour survivre ? L’amour entre un homme et une femme peut-il les sauver ?

Thème classique, mais histoire prenante. Le dessin paraît particulier au premier abord. Il est blur, flouté. Les couleurs prédominantes sont le rouge du sang et le gris de la nuit enneigée arctique. On se rend vite compte que ce dessin contribue grandement à l’ambiance oppressante de l’histoire. Un peu comme une peinture artistique : plutôt que d’imiter la réalité, il la transcende pour faire naître en nous des émotions.

Une excellente bande dessinée de vampires, bourrée de bonnes idées scénaristiques, pour lecteurs assez avertis (16 ans à mon avis).

Un film américain de David Slade a adapté cette bande dessinée en 2007.



 

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